162 : petit parc

D'après les notes de jardinage de mon grand-père Jacques, c'est ainsi qu'était surnommé le terrain situé derrière le tennis, l'antique château d'eau et feue la grange des bois.
J'adore ce coin : sec et sableux, il semble toujours écrasé de soleil. Les lumières de fin d'après midi y sont particulièrement belles. La pauvreté du terrain rend la végétation plutôt rabougrie.
Sur le sol, de la mousse, des herbes sèches et rases, du lichen, des sedums, et souvent le sable à nu. Ce maigre sol est malheureusement progressivement envahi par les sceaux de Salomon dont on ne peut pas dire qu'ils sont très beaux mais qui nous font le plaisir de disparaître complètement pendant la saison froide.


Les chênes sont nains et difformes, mais une taille annuelle légère des branches mortes ou disgracieuses permet de leur conserver une forme parfois intéressante.
Les bouleaux au bois pourri s'écroulent en miettes au moindre coup de vent.
Les pins et les acacias tiennent mieux le coup.



Le plus remarquable sur ce terrain sont quelques grands et beaux genévriers, peu courants dans la forêt, plantés là il y a probablement plus d'un siècle : j'ai l'impression de les avoir toujours connus tels qu'ils sont aujourd'hui, avec leur écorce tourmentée aux formes insolites ou fantasmatiques et leurs nuages de fines aiguilles vert-de-gris.


En automne ils sont couverts de baies violacées (qu'on n'a jamais réussi à faire germer !). Et quand ils sont grillés par le soleil, ou mouillés par une rare pluie d'été, leur odeur de résine est enivrante.
De temps en temps une tempête en fait tomber un. Une fois secs, en brûler les branches est comme brûler de l'encens : on en garde quelques petites bûches pour le plaisir des narines. A la coupe, le bois est magnifique, très rouge avec des veines plus sombres, tortueuses et bien marquées : un simple coup de ponçage dégage des effluves paradisiaques.
Mais c'est un peu triste quand l'un d'eux s'effondre car à la longue, ils vont tous disparaître alors qu'on ne voit aucun rejeton pour les remplacer ...

Tiens, au fait, voilà un petit bosquet de ces arbres abritant un confortable tapis moussu où je verrai bien mes cendres dispersées quand le moment sera venu ! Je crois qu'elles y seront très bien !


6 commentaires:

cat a dit…

je suis rassurée: tu n'es donc pas centenaire... pourquoi ne parles tu pas de la jolie mousse du tennis?

visuelepreludes a dit…

Roch au Pays des Merveilles !!!

Clo a dit…

Je sais maintenant que le faux-muguet a un nom…
Mais j'ignorais que ce coin là de Saint Éloi te passionnait aussi… et à voir tes photos, je me dis que je n'ai jamais vraiment pris le temps de m'attarder là !

maman a dit…

Roch, ce texte est magnifique et rend très bien l'atmosphère de ce "petit parc", baptisé par mon beau-père... Parfois par temps sec et ensoleillé, j'y retrouve les odeurs de Nisou Rose

pacolem a dit…

Encore plus belles, tes photos !
Et cette légère brume...un régal !
3 commentaires:
- Les génevriers sont en fait des cyprès. (parole d'expert)
- Après les ormes, les bouleaux et les acacias sont condamnés.
- Tu aurais pu mentionner les dizaines de douglas et de pins laricio que j'ai planté là au fil des ans et qui prospèrent, quand les "cochons" ne les détruisent pas au départ!

roch a dit…

J'ai des doutes sur l'expert ! Ces arbres correspondent en tout point à la description du "juniperus occidentalis" tel qu'il est décrit dans mes bouquins ... En particulier, aucun "cupressus" ne semble donner des baies violettes !