140 : deux monuments

L'Ensemble Inter-Contemporain à Pleyel : le décor change, le chef change (Boulez), les instrumentistes demeurent, toujours aussi bons.
Concert consacré à deux figures majeures de la deuxième moitié du XXème siècle : Stockhausen [1] et Ligeti [2]. Autant je connais bien le second pour lequel j'ai une très grande admiration, autant je n'ai pas écouté grand chose du premier qui m'a toujours fait un peu peur de par sa période sérielle pure et dure [3], ses excès électroacoustiques et sa philosophie tendance new-age ...

Trois pièces de Karlheinz Stockhausen :

"Kreuzspiel" créé en 1952 est destiné à un ensemble de 6 instrumentistes. Au centre un piano très pointilliste, jouant des notes piquées, d'une façon qui semble aléatoire (mais qui ne l'est pas), dans les extrêmes du piano. A gauche du piano, les notes chaleureuses d'une clarinette basse, à droite les notes aigres d'un hautbois.
Derrière, 3 percussionnistes créent une enveloppe assez discrète, parfois plus forte, la rythmique plus rigoureuse prenant alors le pas sur les autres instruments. Le tout est assez plaisant.

"Fünf weitere Sternzeichen" pour orchestre d'une vingtaine d'instruments (2007).
Voilà une œuvre douce, mélancolique et mélodieuse ce qui m'a bien étonné, connaissant Stockhausen comme le compositeur qui a été jusqu'à écrire un quatuor avec ... hélicoptère [4] !
Les deux premières parties semblent un requiem aussi suave que celui de Fauré. Cette comparaison n'est peut-être pas déplacée : il s'agit de la dernière œuvre du compositeur qui devait mourir peu de temps après.
La partie suivante est plus vive, de courtes phrases musicales sont interrompues par des silences de plus en plus marqués. On y retrouve un certain fumet bartokien.
Vient ensuite un surprenant petit concerto pour tuba, très burlesque, le tubiste apparaissant soudain, parcourant la scène en jouant son instrument, saluant puis s'éclipsant comme il était venu, en apparence indifférent à l'orchestre qui l'accompagne ! Cette pièce se termine avec des accents bucoliques et mystérieux. Vraiment très bien et remettant fortement en cause mes idées préconçues !

"Kontra-Punkte" pour 10 instruments (1953). Une atmosphère sérielle mais de belles sonorités orchestrales accompagnant les résonances du piano. Doux, agréable, subtil et envoûtant : me serais-je donc complètement trompé sur ce compositeur ?

Après l'entracte, deux œuvres de György Ligeti :

Je ne m'étendrai pas sur "Kammerkonzert" c'roch'notée il y a un an [5]. La deuxième écoute en concert ne m'a pas déçu bien au contraire : voilà du grand Ligeti, mais qu'est ce qui n'est pas grand dans ses multiples œuvres ?


"Aventures et Nouvelles Aventures" se situe dans la grande tradition du théâtre musical illustré notamment par Kagel et Aperghis. Trois chanteurs arrivent à nous faire croire à une histoire alors qu'ils n'utilisent que des onomatopées ! L'accompagnement musical est incongru, notamment les "percussions" (tapis battu, feuille de journal froissées ou déchirées, coups de marteau sur une table, etc.)
C'est constamment drôle, surprenant et excitant. On y retrouve en germe tout ce qui fera le génie du "Grand Macabre", extraordinaire et ubuesque opéra qu'il créera une quinzaine d'années plus tard et qui, dans la mise en scène de Roland Topor, nous avait stupéfié et enthousiasmé naguère. On espère qu'il sera à nouveau un jour monté à Paris.


[Ligeti : Kammerkonzert (finale)]

Réf.:
[1] : http://brahms.ircam.fr/composers/composer/3060/
[2] : http://brahms.ircam.fr/composers/composer/2062/
[3]
: http://crochnotes2.blogspot.com/2008/11/101-ennui-en-srie.html
[4]
: http://www.stockhausen.org/heli_pg_1.html
[5] : http://crochnotes.blogspot.com/2008/10/97-hypnose-et-saoulographie.html

2 commentaires:

cat a dit…

Avouez que vous êtes tous jaloux!!

Clo a dit…

Ben ouais !

Ton enthousiasme est vraiment communicatif, à chaque fois que je lis tes notes je regrette de ne pas vous avoir accompagnés au concert :)